26 nov. 2013

834 – Qui sommes-nous : Archivistes, Gestionnaires, Analystes, Conseillers… ? (1/2)

J’ai lu avec grand intérêt, le 8 novembre dernier, le billet de Natalie Bissonnette sur Le blogue de Nyctale intitulé « En quête d’identité ». Et je me suis dit que voilà bien l’illustration d’un métier de professionnels et de techniciens, au Québec en tout cas, en perpétuelle recherche de repères identitaires, situation symptomatique d’un malaise latent. Et je partage les préoccupations de Natalie quant à l’étiquette à inscrire sous la signature d’un courriel, d’un livrable…

Personnellement j’ai réglé cette question il y a de ça plusieurs années, en m’identifiant non pas à partir d’approches théoriques du métier, mais plutôt en me collant à la réalité du terrain. Je m’explique.

Dans mon premier emploi à la Division des archives de l’Université Laval (1975-76), je portais le titre d’« archiviste » au sein d’une unité administrative dédiée à la préservation des documents de conservation permanente de nature historique. Mais aussi au maintien de ce qu’on appelait à l’époque d’un « programme » de gestion des documents actifs et semi-actifs et de l’application du Plan de classement uniforme des dossiers dans les unités administratives et pédagogiques de l’institution. Ce qui était ma responsabilité professionnelle assumée avec l’aide de trois techniciens.

En 1977, j’ai été recruté dans un ministère du Gouvernement du Québec (Richesses naturelles) avec comme mandat de concevoir et développer un schéma de classification des documents ministériels. Intégré dans le corps d’emploi d’« analyste en procédés administratifs ». Secondé par deux « techniciens en documentation ». Dans un contexte où, contrairement à celui de l’Université Laval, ce qu’on appelle aujourd’hui la « gestion des documents d’activité » était sous la pleine responsabilité du ministère alors que celle de la conservation des archives (portion des « documents d’activité » à valeur historique) relevait des Archives nationales du Québec où se retrouvaient les seuls « archivistes » du gouvernement. Cette réalité du terrain correspondait d’ailleurs tout à fait à la dichotomie fonctionnelle appliquée dans l’ensemble des administrations gouvernementales nord-américaines. Et je m'y suis identifié tout naturellement

Puis, à partir de 1982, le concept théorique de l’« archivistique » dite « moderne » où tous les documents sont des « archives » sous la responsabilité de professionnels devant tous s'attribuer le titre d'« archivistes » a, avec le recul, contribué à la confusion des genres. Un modèle conceptuel abordant la gestion documentaire à partir de la lorgnette de l’« archiviste » en aval des « documents d’activité » utiles à la gestion et à réalisation de la mission d’un organisme. Cette vision professionnelle nous a été imposée jusqu'à un certain point en « vampiriser » le métier avec ses impacts sur la nature de la Loi sur les archives, les structures internes de l'Association des archivistes du Québec (abolition de la section « Gestion des documents », la formation universitaire des futurs intervenants du métier... 

Cette approche répondait davantage « aux besoins de l’administration et de la recherche » dans un contexte où certaines unités d’archives universitaires de l’époque luttaient pour s’imposer par rapport aux « services des systèmes et méthodes » (ancêtres des services de TI) dont le rôle premier de ces derniers était de fournir aux unités administratives les politiques, les directives, les procédures, les formulaires pour une gestion efficace et efficiente des activités. Un modèle conceptuel qui, j’en suis profondément convaincu, a nui au positionnement du métier, particulièrement avec la place et l’influence que les TI ont progressivement prise dans les organisations. Je suis conscient que cette affirmation est téméraire; mais elle s’appuie sur de nombreuses conversations que j’ai eues avec des collègues et des clients.

Personnellement, je n’ai jamais adhéré à cette approche « archivistique », considérant que les interventions en amont des « archives » répondaient d’abord à des besoins de management. J'ai toujours considéré et intégré dans mes interventions le fait que si la systématisation des processus était adéquate et maintenue dans le temps durant la vie utile des documents à des fins administratives, juridiques ou légales, la portion des documents de conservation permanente à valeur historique (les « archives ») allait être adéquatement identifiée pour être archivée au moment opportun, conservée, préservée et mise en valeur par les « Archivistes ». Dans un processus continu de gestion d’une ressource selon un cycle de vie prédéfini où chaque intervenant professionnel joue son rôle dans son champ d’action. (Suite)

Michel Roberge

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