27 nov. 2013

835 – Qui sommes-nous ? Archivistes, Gestionnaires, Analystes, Conseillers… ? (2/2)

Au cours de mes quarante années dans des services publics et au sein de mon entreprise, j’ai été moi aussi, comme Natalie Bissonnette, en quête d’identité. Les différentes versions de mes cartes professionnelles pourraient en témoigner. Pour des raisons que j’ai déjà expliquées dans des billets précédents « Pour en finir avec l'expression Records Management " », je n’ai évidemment jamais porté le titre de « Records Manager ». Ni celui de « Gestionnaire de documents », conscient que cette fonction, particulièrement avec l’introduction des outils bureautiques, est désormais assumée par l’ensemble du personnel d’une organisation, tout niveau d’emploi confondu. Tous sont devenus par la force des choses « gestionnaires de documents » (fichiers informatiques, courriels…) dans leurs unités administratives.

Je ne me suis jamais non plus identifié en tant que « Gestionnaire de l’information », expression qui m'a toujours semblé être une aberration puisque par définition, l’information est intangible alors que la notion de document repose sur la combinaison d’information et de support matériel sur lequel celle-ci y est consignée ou enregistrée. Le récent billet de Daniel Ducharme « Le jouet Écran magique (Etch a Sketch) et le règle de l’éphémère » illustre bien que l’information peut être conservée, donc gérée, si et seulement si elle est fixée sur un support stable non modifiable pour en assurer l’intégrité et qu’il ne soit surtout pas réutilisé pour y stocker de nouvelles informations. Un fichier informatique est un document puisque l'information qu'il contient est portée par un support technologique tangible et qu'on ne peut l'altérer.

Les titres d’« analyste » ou de « conseiller » que j’ai aussi portés m'ont rendu conscient, dans le quotidien, que mon rôle professionnel outrepassait celui d’analyser des problématiques et de recommander des solutions, voire de me limiter à conseiller les gestionnaires. Ils m’ont laissé insatisfait jusqu’au jour où, en rédigeant mon livre sur La gestion intégrée des documents (GID) en format papier et technologique, j’ai fait un temps d’arrêt afin de lister l’ensemble des responsabilités et des actions que des professionnels comme moi devaient assumer concrètement :
  • évaluer les pratiques actuelles;
  • établir des plans d’action;
  • concevoir et développer des outils afin de structurer les documents et les dossiers;
  • planifier leur durée de vie et leur sort final une fois leur utilité administrative et légale terminée;
  • produire du matériel de communication, d’information et de formation du personnel;
  • sélectionner des solutions technologiques qui répondent aux besoins;
  • rédiger des politiques, des directives, des procédures sur tous les aspects de gestion des documents (traitement, description [métadonnées];numérisation des documents, transfert des semi-actifs, versement des archives…);
  • animer des activités de formation;
  • accompagner et soutenir les utilisateurs des documents tant au niveau des processus que de l’utilisation des solutions technologiques;
  • mettre en place des mécanismes récurrents d’audit pour assurer la maintenance du système;
  • ...
Un corpus de compétences que des « experts » (n’ayons pas peur des mots) d’un domaine complexe comme le nôtre doivent maîtriser (savoir, savoir-faire, savoir-être) sur le « comment faire » les choses : la « gouvernance » d’une ressource. Une responsabilité professionnelle qui, dans les organisations, considère les utilisateurs des documents comme étant les acteurs principaux d'une gestion documentaire, fonctionnelle, efficace, efficiente et pérenne.

C’est pourquoi, il y a quelques années, j’ai décidé de m’identifier comme « Expert en gouvernance documentaire ». Un titre court qui s’inscrit dans les préoccupations modernes du management des organisations et de la gestion intégrée de leurs documents d’activité. Dans un métier qui n'est pas une spécialité de l'histoire ni de la bibliothéconomie, mais bien des sciences administratives ou de la gestion.

Dans le positionnement stratégique de nos responsabilités respectives et collaboratives de spécialistes de la gestion des documents d'activité (Experts en gouvernance documentaire) d'une part et, d'autre part, de responsables de la préservation de la mémoire historique (Archivistes), je suggère de méditer sur la sagesse d'un grand classique de la poésie classique (la fable « Le vacher et le garde-chasse » de Jean-Pierre Claris de Florian). Nous en sortirons tous gagnants... et plus influents.

Michel Roberge

PS : Je vous invite à répondre au sondage de Natalie Bissonnette sur Le blogue de Nyctale : " Nouveau titre pour Archiviste " Parmi les choix offerts, lequel préférez-vous ? " Vous pouvez aussi en suggérer de meilleurs et suivre le résultat des réponses des lecteurs. Comme me l'indiquait Natalie, " à la lumière des résultats au sondage, un article sera publié sur les préférences émises par les participants-es sur le blogue Convergence " de l'Association des archivistes du Québec. Et comme toujours, vos commentaires sont les bienvenus.

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