Récemment, j’assistais à la présentation d’une application logicielle dite de gestion documentaire, ou de Gestion électronique des documents (GÉD) ou de Gestion intégrée des documents (GID). Selon la personne qui en faisait la démonstration, c’était du pareil au même! Vous savez, ce genre de solution qui fait tout, y compris le café. La personne qui en faisait la présentation bien en verve ne tarissait pas d’éloge de la réalisation de son entreprise, allant même jusqu’à la qualifier de « révolutionnaire ». Et ce, bien qu’elle reprend et regroupe des fonctionnalités déjà existantes dans des produits concurrents offerts sur le marché depuis quelques années.
Encore faut-il préciser quel sens on veut bien accorder à l’adjectif issu du mot « révolution » : mouvement orbital qui consiste à tourner en rond, changement brusque et violent par rapport à une situation existante ou agitation soudaine et passagère? Mon vécu professionnel en gestion des documents administratifs depuis 1975 m’incite à ne jamais inclure dans mon vocabulaire pédagogique toute incitation à la pensée magique selon laquelle la solution technologique miraculeuse est la panacée. Combien d’organisations ont été déçues par des promesses de charlatans inexpérimentés et ne croient plus aux avantages d’un système de gestion documentaire efficace et à sa pérennité!
Cette attitude d’arriviste non spécialiste qui s’emploie à jeter de la poudre aux yeux de ses interlocuteurs m’a aussi rappelé cette autre réflexion de Jean-Claude Carrière (N’espérez pas vous débarrasser des livres, page 47 – définitivement un ouvrage qui alimente l’intellect) ne peut mieux décrire cette situation qui faisait bien sourire des gens dans l’assistance :
« …chaque fois qu’une nouvelle technique apparaît, elle veut faire la démonstration qu’elle dérogera aux règles et contraintes qui ont présidé à la naissance de toute autre invention dans le passé. Elle se veut fière et unique. Comme si la nouvelle technique charriait avec elle, automatiquement, une aptitude naturelle pour ses nouveaux utilisateurs à faire l’économie de tout apprentissage. Comme si elle apportait d’elle-même un nouveau talent. Comme si elle s’apprêtait à balayer tout ce qui l’a précédée, faisant du même coup des analphabètes retardataires de tous ceux qui oseraient la refuser. »
Michel Roberge
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